Momon Maguy Chayne Sporting-Club Salonais Rugby Salon
Momon et Maguy Si loin, si proches
Première pause avant l'orage
Vraiment, je n’ai que de bons souvenirs de ces années de guerre, sachant très bien que ça allait bien finir pour nous qui étions du bon côté de la barrière, pas celle de « Maréchal, nous voilà »
C’est en 41 je crois que j’ai connu la famille Arnaud : Le père, Paul, avait été mobilisé à Lambesc, et il a tout de suite sympathisé avec papa, puis Maguy et sa maman sont souvent venues chez nous, en car, et nous, nous sommes souvent allés à Pont de Crau. Là est née une amitié que seule la mort détruira, bien que Maguy et moi ne nous voyons pratiquement jamais. A partir de 41, j’allais passer chez eux le mois de Juillet, et Maguy venait à la maison au mois d’Août. C’est à ce moment-là que j’ai vu, pendant les fêtes d’Arles, la Comédie Française au théâtre antique, et aussi l’Opéra de Paris. Les Allemands occupant le nord, tous ceux qui ne voulaient pas vivre sous leurs bottes s’étaient repliés en zone non-no et nous avions dans le Midi tout ce que le théâtre, l’opéra et le cinéma avaient de meilleur. Beaucoup avaient toutefois pactisé avec l’ennemi, et étaient restés à Paris, comme Guitry, Arletty, et tant d’autres qu’on entendait beaucoup à la radio mais qu’on ne voyait pas par chez nous.
Les deux Maguy
Juillet 43
Maguy et Maguy Ripert
José Luccion, idôle de Maguy!
Un sacré grand chanteur
C’est à cette époque que j’ai vu José Luccioni, il nous réveillait le matin en chantant à pleine voix, et quelle voix « Pourquoi me réveiller au souffle du printemps » C’était un moment d’extase pour moi, le nez collé à la grille, j’écoutais ce chant venu pour moi du cœur de la terre. Il avait une superbe auto blanche, avec les sièges en cuir rouge, et sur la plaque du tableau de bord, il y avait « José Luccioni, chanteur lyrique de l’Opéra de Paris ». C’était en 41 ou 42, j’avais seize ou dix-sept ans et j’étais éblouie. Un soir, il a chanté Tosca au théâtre de Salon, avec Germaine pape en Tosca et Adrien Legros en Scarpia, il ne serait plus rentré une épingle dans le théâtre, tout Marseille était là, et il a bissé, trissé les morceaux célèbres que les gens réclamaient, il était couvert de fleurs, c’est, je crois, une des plus belles soirées que je n’oublierai jamais.
Avec tonton et Tantine Lo, j’ai vu là aussi Les Pêcheurs de Perles, Manon, Faust, Carmen, le Pays du Sourire et bien d’autres choses, mais avec des ténors qui étaient souvent petits, gros, et que leur partenaire dépassait d’une bonne tête : Entre autres Lucien Vonna, un Faust tel que, si j’avais été la Marguerite de l’opéra, je serais partie dès le premier acte avec Méphisto, le superbe Adrien Legros. J’ai vu aussi Mireille avec Jori Bouè, Legros et Vonna, et puis des opérettes très connues il y a cinquante ans, Phiphi, Dédé, les opérettes marseillaises, Mais tout ça avant l’occupation de la zone libre, après c’était fini, tout a été interdit, sauf ce qui prônait l’amitié franco-allemande, mais ce n’était pas notre envie ! Après, je suis encore allée à Arles, aux corses de toros, les courses à la cocarde où un razeteur beau comme un dieu grec et adroit comme pas un, Fidani, faisait un malheur. J’ai gardé longtemps un gland qu’il avait arraché pendant une course, et que Maguy Arnaud avait pu m’avoir. Ce Fidani s’est avéré être de 42 à 44 un collabo de première, il a mal fini à la libération, je crois. Nous allions aussi, avec Maguy et sa bande, sillonner les routes de Camargue, toujours en vélo, si on comptait les kilomètres que j’ai fait dans ma vie en bicyclette, ce serait plus que le tour du monde.
Charles Fidani
Toujours vivant, semble-t-il...